Le temps
Ca y est j'y suis. Je suis dans cet espace-temps, cette donnée magistrale, souhaitée et absolue.
Voilà, disons qu'avoir du temps pour soi, c'est à la fois ce à quoi on aspire, mais une fois qu'on s'y trouve, qu'on détient cette matière-temps à modeler, c'est l'angoisse. On ne se rend pas compte à quel point, un job, une fonction vous qualifie et quand tout s'arrête, c'est le vertige. On se sent dépossédé d'une identité, on est face à soi-même et la remise en question est lourde.
A quoi sert-on ? Qu'est-ce qui est utile au fond ? Certes le boulot n'est pas tout, mais au fond, une activité quotidienne qui vous amène à rencontrer des gens, qui vous prodigue de l'énergie, c'est de la ressource pour se créer des belles secondes journées. Car le boulot n'est pas tout, mais quand il n'est plus, ne restent que les loisirs qui théoriquement servent et prennent sens pour souffler quand on bosse.
Bref, on voit son esthétécienne, son médecin urgentiste, sa pharmacienne et des contacts en soirée et là... on répond quoi à leur question "c'est quoi votre métier ?" On dit son métier mais on sait qu'on ment. Et puis, il y a votre entourage qui n'a de cesse de vous faire piger que tout va bien, qu'il faut garder espoir et que 2013, c'est ok pourri mais que tout va bien. Et ouaih tout va bien seulement, expliquer et encore expliquer, pour les rassurer bien sûr, qu'on est en forme, à force, ça fait douter... On parle jamais du licenciement-blues, c'est comme d'autres "machin-blues", on doit montrer notre côté gnack, on doit assurer en tant que priviligié du temps libre, mais on a besoin d'un temps que même tout ce temps dont on dispose n'est pas celui dont on a besoin.
Hard à comprendre... et puis il y a celui qui vous dit "En 2013, faut pas mentir alors sur ton CV pas de conneries...", celui à qui même je dirai pas qu'en plus d'être chômeuse, je suis enceinte...
Alors mes tribulations, c'est mes trainailleries dans cette période où double temps m'est offert... avec toute cette vacuité-mais-que-vais-je-en-faire et ce bonheur de pouvoir en disposer. Ces gens que je vais croiser, ces remplissages bien ordonnés qui manqueront pas de me sauter dessus, ces rdv amis, médecins et conseillers pôle-emploi qui rythmeront ces jours de creux à remplir...
